Présentation de la famille botanique
Les orchidées sont des plantes Angiospermes Monocotylédones. Elles seraient apparues au cours du Crétacé. La famille des Orchidacées compte aujourd’hui entre 25 000 et 30 000 espèces différentes ! Près d’une plante à fleurs sur douze est une orchidée, ce qui fait de cette famille botanique une des plus diversifiées au monde. Très appréciées à travers le monde, les orchidées comptent pas moins de 140 000 cultivars différents. Et pourtant, seulement 15 à 30 espèces sauvages sont à l’origine de cette immense domestication végétale !
L’évolution végétale des Orchidacées demeure encore aujourd’hui un mystère complexe à élucider. Les convergences évolutives dans les interactions mutualistes « plante-champignon » et « plante-insecte » contribuent certainement à des sélections darwiniennes au sein des populations concernées. Les très fréquentes et vigoureuses hybridations au sein des genres Ophrys sp., Dactylorhiza sp. et Serapias sp. seraient également les preuves que ces taxons ne sont pas encore stabilisés évolutivement. Il peut exister des hybridations intragénériques (entre individus au sein du même genre) et même extragénériques (entre individus de deux genres différents) ! Ce qui laisse à penser que parmi de nombreux taxons d’Orchidacées, la spéciation demeure encore floue. Ces hybridations buissonnantes sont peut-être le signe de nouvelles spéciations en cours.
Morphologie d’une fleur d’Orchidée
Les Orchidacées sont des Monocotylédones à ovaires infères. L’enveloppe de la fleur ou périanthe suit une formule florale de trois sépales et trois pétales, disposés par symétrie bilatérale. L’un des trois pétales présente une forme irrégulière et se situe en général en bas de la fleur, il s’agit du labelle. Les deux autres pétales sont disposés latéralement, en position supérieure. Les sépales s’opposent à cette disposition, le sépale dorsal fait face au labelle et les deux autres sont flanqués latéralement en position inférieure par rapport aux pétales latéraux. Très souvent, le labelle se prolonge en un éperon arrière qui peut contenir du nectar ou leurrer les espèces butineuses !
Les familles voisines des Orchidacées présentent des étamines et stigmates bien distincts, qui surmontent l’ovaire infère cachée dans le pédoncule floral. Mais chez les Orchidées, les organes mâles et femelles sont fusionnés au niveau du gynostème. Située au centre de la fleur, cette pièce florale fusionne à sa base avec le labelle. La plupart du temps, il ne demeure qu’une seule étamine, avec deux sacs polliniques logés dans les cavités du gynostème. Il s’agirait d’une évolution propre à cette famille botanique, leurs ancêtres possédaient certainement trois étamines dans leur formule florale. Les stigmates ont fusionné en une cavité stigmatique, situé à la base du gynostème et en communication arrière avec l’ovaire infère.
La pollinisation chez les Orchidées
Les orchidées ne fleurissent pas dès la germination. Il faut en effet attendre 2 à 10 ans chez la plupart des espèces avant que la rosette ne développe une hampe florale. Les orchidées se reproduisant le plus souvent par fécondation croisée. Elles sont donc dépendantes d’agents pollinisateurs. Les Insectes assurant ce rôle sont nombreux : Hyménoptères, Diptères, Lépidoptères, Coléoptères … Il peut exister des associations étroites entre deux espèces d’Ophrys et pollinisateur. Soit autant de coévolutions potentielles !
Différentes stratégies sont mises en œuvre pour assurer cette pollinisation. Afin que l’insecte se colle aux pollinies situées dans les cavités du gynostème, il suffit de l’attirer par différentes manières !
- La sécrétion de nectar : au niveau de l’éperon, certaines espèces comme Platanthera sp. ou Anacamptis sp. produisent du nectar attirant les insectes. Chez d’autres comme Dactylorhiza sp., l’éperon est un leurre. Enfin, la Listère ovale produit son nectar directement sur son labelle.
- L’attrait odorant : le Sabot de Vénus est une orchidée tempérée qui utilise cette stratégie fréquente chez les espèces tropicales. L’émission de molécules parfumées attire certaines abeilles sauvages jusqu’à l’intérieur de son labelle creux.
- La protection : les pétales peuvent former des abris pour les Insectes, qui en retour du gîte offert par la corolle dissémineront le pollen collé à leur corps. Il peut s’agir d’abris nocturnes ou lorsqu’une averse menace. Ce phénomène d’interaction écologique est avéré notamment pour les Serapias sp.
- Les leurres sexuels : interaction la plus connue, elle consiste à inciter les Insectes à la copulation par leurre visuel et émission de phéromones.
La fécondation et modes de reproduction alternatifs
Le phénomène est assez lent, il faut compter plusieurs semaines pour que le tube pollinique atteigne l’ovaire infère. Une détorsion (mouvement de torsion) s’effectue après fécondation chez les Orchis sp. et les Dactylorhiza sp. Le fruit des Orchidacées est une capsule allongée à trois loges. Il contient plusieurs milliers de graines. Si la plupart du temps les orchidées se reproduisent par fécondation croisée, trois autres modes de reproduction peuvent se rencontrer dans la nature :
– La reproduction végétative par production de tubercules comme chez Serapias lingua.
– L’autogamie ou autofécondation lorsqu’elle n’a pas été pollinisée, comme chez les Epipactis, l’Ophrys abeille ou encore la Céphalanthère de Damas.
– L’apomixie durant laquelle les ovaires donnent des plantules embryonnaires sans fécondation par le pollen. C’est le cas de la Nigritelle d’Autriche, qui utiliserait cette stratégie comme adaptation au froid.
La germination
L’immense majorité des graines d’orchidées ne germeront jamais. En effet, pour que ce phénomène se produise il leur faut l’implication d’un champignon du sol. La graine ne mesure que 0,2 à 0,6 mm et ne possède pas de cotylédon. Sans ces précieuses substances de réserves, l’embryon ne peut se développer. La graine est cependant recouverte d’un voile alvéolaire appelé testa, qui favorise la dispersion éolienne puis sa réhydratation.
Pour son développement, l’embryon est alors dépendant de la présence d’un réseau de filaments mycéliens émis par les champignons du sol. Si l’association entre graine et champignon s’effectue correctement, la mycorhization en résultant va fournir à l’embryon les nutriments nécessaires à son développement ainsi que les antibiotiques qui lui permettront de repousser les bactéries du sol. Une fois mycorhizés, les embryons d’orchidées peuvent cependant rester des années dans le sol avant de se développer en plantules.
La mycorhization, un cas de mutualisme plante-champignon
En biologie, deux espèces ayant une interaction à bénéfices réciproque ont une relation de mutualisme. Dans le cas des orchidées, cette interaction positive est indispensable au développement de l’embryon végétal. Mais elle cesse chez de nombreuses espèces chez la plante adulte. Cette association peut cependant perdurer chez certaines espèces et devient alors une symbiose mycorhizienne obligatoire.
En laboratoire, il est possible de provoquer la germination en apportant les substances nutritives nécessaires à des graines cultivées dans un environnement contrôlé. Cependant, la présence de filaments mycorhiziens est toujours nécessaire à cette étape dans la nature. L’orchidée présente au niveau de ses racines des tissus mycorhizés, dans lesquels les rapports entre cellules végétales et fongiques sont ambivalents ; les cellules semblent se digérer à tour de rôle, et l’orchidée contrôle la propagation fongique en émettant des substances fongicides comme l’orchinol ou encore l’hircinol. Si le champignon apporte des nutriments à la plantule, les bénéfices tirés de cette association par le partenaire fongique ne sont pas encore clairement établis.
Cette interaction ne perdure pas chez les orchidées adultes pour de nombreuses espèces. Nous ne sommes alors pas en présence de mutualisme durable ou symbiose. Mais selon les espèces, il existe deux grandes situations de symbiose « plante-champignon » durable à l’âge adulte. Ce qui nous permet de résumer ci-dessous les trois scénarios mutualistes possibles chez les orchidées non-épiphytes :
- Les espèces à mutualisme temporaire qui perdent cette relation « plante-champignon » une fois la plantule suffisamment développée pour assurer sa propre nutrition photosynthétique.
- Les espèces mycohétérotrophes non-chlorophylliennes qui sont donc strictement dépendantes de cette symbiose pour assurer leur bilan nutritif. C’est le cas de la Néottie nid d’oiseau qui dépend des champignons Sebacina sp.
- Les espèces mixotrophes qui conservent un rôle partiel de la photosynthèse dans leur nutrition. Ou bien étant des espèces sciaphiles, elles bénéficient d’un ensoleillement insuffisant pour que leur photosynthèse réponde pleinement à leurs besoins nutritifs. C’est le cas du Limodore à feuilles avortées et de l’Epipactis à petites feuilles.
Écologie des orchidées
Selon les conditions du biotope, les orchidées européennes peuvent se regrouper en deux grandes préférences écologiques. Les espèces héliophiles comme les Ophrys sp., et les espèces sciaphiles comme les Cephalanthera sp. La nature du sol importe également. De nombreuses orchidées nécessitent des sols riches en calcaire, tandis que d’autres tolèrent des sols modérément acides. Mais toutes les orchidées nécessitent des sols pauvres en nutriments. Ces espaces oligotrophes sont ainsi sensibles à la pression anthropique et l’enrichissement des sols. Dans les prairies, l’apport d’engrais provoque alors la disparition des populations d’orchidées.
Les espèces d’Orchidacées européennes sont terrestres, ce qui n’est pas le cas de la plupart des espèces tropicales qui sont des épiphytes ! Ces dernières prospèrent la plupart du temps accrochées à un arbre, ou encore sous la forme d’orchidée-liane comme la vanille. En France métropolitaine, l’étude des orchidée est affaire de spécialistes comme d’amateurs avertis. Cependant, la Loi française ne protège qu’une partie des espèces. Il convient cependant de respecter leurs populations sauvages dans toutes les conditions. Leur cueillette est à proscrire, la contemplation et la photographie sont à encourager !