Les inventaires naturalistes continus des ZNIEFF

Une ZNIEFF correspond en France à une zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique. Il s’agit d’un espace naturel terrestre ou marin de Métropole ou d’Outre-mer. La présence d’une espèce « déterminante » permet de classer un site comme ZNIEFF. Depuis 2016, l’inventaire des ZNIEFF est continu sur le territoire et organisé selon une méthodologie commune. Commandités par le ministère en charge de l’écologie, les inventaires sont structurés selon un schéma opérationnel pyramidal, dont le MNHN assure la coordination et l’animation.

La ZNIEFF du Puy de Montrognon (63) en automne. Cliché : Guillaume Calu

Présentation

L’inventaire des Zones Naturelles d’Intérêt Écologique, Faunistique et Floristique (ZNIEFF) débute en 1982. Le ministère de l’environnement lance alors avec le soutien du MNHN un inventaire sur l’ensemble du territoire national des espaces d’intérêt écologique. L’objectif vise ainsi à recenser l’ensemble des secteurs abritant la biodiversité patrimoniale. Ce socle de connaissances ne s’accompagne pas de mesures de protection des espaces naturels. Mais comme un outil d’aide pour l’aménagement territorial.

Cet inventaire sert aussi de base de hiérarchisation des enjeux du patrimoine naturel, et des stratégies nationales ou régionales pour la biodiversité. Il est notamment utilisé pour les études d’impact et l’évaluation environnementale (exemple de la Loi du 12 juillet 1983 dite loi Bouchardeau).

Les deux types de ZNIEFF

  • Les ZNIEFF de type I : espaces de petite superficie, écologiquement homogènes. Elles se définissent par la présence d’espèces, d’associations d’espèces ou d’habitats rares. Leur présence rend cet espace remarquable ou caractéristiques du patrimoine naturel régional. Ces zones peuvent être aussi des espaces d’un grand intérêt écologique fonctionnel. Par exemple, un corridor écologique.
  • Les ZNIEFF de type II : grands espaces hétérogènes mais qui intègrent des ensembles naturels fonctionnels et paysagers. Ils présentent une cohésion élevée et sont biologiquement plus riches que les secteurs voisins. Elles peuvent inclure une ou plusieurs zones de type I.

Il reste encore des espaces remarquables à décrire et des espèces à inventorier ! De plus, les populations des milieux naturels et les territoires sont susceptibles d’évoluer au cours du temps. De ce fait, l’inventaire des ZNIEFF est désormais continu sur le territoire national. L’INPN publie depuis 2016 sur son site web un nouveau guide méthodologique répondant à cette exigence.

Enfin, les ZNIEFF ne constituent pas des sites naturels protégés. Aucune mesure dans le Code de l’Environnement ne les sanctuarisent, mais elles peuvent intégrer des sites protégés (comme Natura 2000). Néanmoins, leurs inventaires constituent des éléments majeurs pour la politique de conservation de la nature. En effet, ces bilans naturalistes doivent être consultés en amont de tout projet d’aménagement du territoire. Ils revêtent donc une importance majeure dans les Schéma de cohérence territoriale (SCoT) ou les plans locaux d’urbanisme (PLU).

Organisation des inventaire ZNIEFF

Les inventaires ZNIEFF concernent l’ensemble du territoire français : métropole et territoires d’Outre-Mer, milieux continental et marin. Ils ont connu une modernisation nationale entre 1995 et 2016 afin d’améliorer l’état des connaissances. Depuis lors, l’harmonisation des méthodes d’inventaire et des critères d’identification des ZNIEFF a permis de faciliter la diffusion de leur contenu.

Désormais régis par une méthodologie commune, les inventaires ZNIEFF s’organisent selon un schéma structurel porté par l’UMS 2006 Patrimoine naturel (MNHN) et le ministère de l’environnement. Ce dernier est commanditaire de cet inventaire. Il apporte en conséquence un soutien financier. L’UMS 2006 Patrimoine Nationale se charge de l’animation nationale, de la coordination méthodologique et de la validation scientifique de l’inventaire à l’échelle nationale.

Les maîtres d’œuvre de l’inventaire sont, à l’échelle régionale et des territoires d’outre-mer, les directions régionales en charge de l’environnement (DREAL, DRIEE-IF, DEAL, DTAM). Elles s’appuient pour chaque région sur un Conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN) qui aura pour mission d’évaluer les données naturalistes relayées par les réseaux locaux. A l’échelle de chaque territoire local, un Secrétariat scientifique peut venir épauler les CSRPN. Sur le terrain, le réseau naturaliste se compose des associations, CEN, ONF, RNF, CNB, sans oublier tous les programmes de sciences participatives citoyennes.

Un réseau de naturalistes terrain

La saisie des informations se fait grâce à sur une application web dédiée. Les données remontent selon une chaîne pyramidale comprenant les coordinateurs locaux puis régionaux. Après validation régionale par les conseils scientifiques régionaux, l’ensemble des données sont transmises à au MNHN pour une validation nationale.

Prenons une illustration régionale. La DREAL Auvergne-Rhône-Alpes a récemment révisé la listes des espèces déterminantes pour le ZNIEFF régionales sur la période 2016-2019. Cette liste est consultable par taxons sur le site web de la DREAL. En conséquence, la DREAL Auvergne-Rhône-Alpes s’est également engagée dans l’actualisation des inventaires ZNIEFF de la région. Elle a donc mobilisé le réseau naturaliste au niveau régional. La LPO Auvergne-Rhône-Alpes a ainsi souhaité contribuer à l’actualisation de ces inventaires et mobilise ses propres réseaux locaux. Pour se faire, elle met à disposition plusieurs outils (webmapping, documentation) afin de coordonner les efforts sur le terrain. Elle n’est bien entendu pas seule à mobiliser son réseau naturaliste. Par exemple le CEN Auvergne, lui aussi, participe à cette mobilisation terrain.

Fauvette pitchou. Cliché : Guillaume Calu

Pertinence des inventaires ZNIEFF : l’exemple de la région AuRA

Face à cette actualisation, la question de l’intérêt des ZNIEFF en matière de conservation de la biodiversité paraît légitime. En effet, une ZNIEFF ne correspond pas à une mesure de protection d’un espace naturel. Si l’inventaire ZNIEFF sert d’indicateur sur l’état actuel des habitats naturels et espèces déterminantes, il ne garantit donc pas pour autant la pérennité des zones concernées.

Le CEREMA a réalisé une étude sur les dynamiques d’artificialisation dans les ZNIEFF de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Sur la région, les ZNIEFF de type 1 couvrent 17% du territoire. Soit un total de 3317 ZNIEFF de type 1. Parmi celles-ci, 2532 n’ont fait l’objet d’aucune construction nouvelle entre 2006 et 2017 (ZNIEFF non-construites, partiellement construites ou urbanisées). Contre 785 ayant subi une artificialisation. Soit une dégradation des habitats pour 23,66 % des ZNIEFF de type 1 en l’espace d’une décennie.

Les ZNIEFF concernées sont principalement des zones humides et des coteaux secs. Deux types de milieux pourtant cruciaux pour la biodiversité et sensibles aux dégradations. Un point en faveur de la région AuRA : la dynamique d’artificialisation dans les ZNIEF est inférieure à la moyenne régionale. Cependant, l’étude montre qu’une fois artificialisée, une ZNIEFF est progressivement « grignotée » . En effet, 97,4 % des ZNIEFF de type 1 non-construites sont intactes au cours de la décennie, contre 73,8 % des ZNIEFF partiellement construites et 41,5 % des ZNIEFF urbanisées.

Les ZNIEFF sont-elles dépassées ?

En conclusion, une ZNIEFF présentant le moins de constructions possibles a plus de chances d’être sanctuarisée. La prise en compte des inventaires ZNIEFF dans les PLU et SCoT montre que l’urbanisation intensive concerne peu de zones. Au contraire des constructions ou aménagements ponctuels. Mais cela conduit tout de même à l’artificialisation progressive des sols. Enfin, cette étude montre à la fois la force et la faiblesse de ces inventaires, qui pour l’heure ne peuvent que ralentir la dégradation de ces habitats. Alors, faut-il abandonner les ZNIEFF ? Non, bien entendu. Car à défaut de véritablement protéger les habitats identifiés, elles représentent une importante source de données naturalistes et contribuent à mesurer l’état de la biodiversité en France.

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