L’élevage de sangliers en France

Sujet fréquemment débattu sur les réseaux sociaux, l’élevage de sangliers est-il autorisé en France ? Et si oui, est-il permis aux chasseurs de les relâcher dans la nature à des fins cynégétiques ? Ce court article vous propose de faire le point sur la question.

élevage sangliers

Elevage de sangliers et réglementation

Il existe 2 types d’élevage de sangliers en France :

  • Les élevages de catégorie A : sangliers élevés pour être relâchés dans des espaces clos et fermés (parcs de chasse)
  • Les élevages de catégorie B : animaux destinés à la commercialisation après abattage dans un abattoir agréé.

Entre les années 60 et 80, élever et libérer du sanglier dans la nature était très simple. L’Arrêté du 28 février 1962 laissait liberté pour repeupler les populations sauvages de grands gibiers. Mais depuis l’Arrêté du 8 octobre 1982, l’élevage de sangliers est réservé aux seuls professionnels. Voir aussi les Arrêtés de 1994 et 2009, qui subdivisent et réglementent les catégories A et B et mises à jour selon critères de l’UE.

Chaque établissement doit avoir un responsable titulaire d’un certificat de capacité pour l’élevage de sangliers afin d’ouvrir légalement. Sinon, l’élevage est clandestin et donc interdit.

Elevage et hybridations

Seuls peuvent être détenus dans un élevage de sangliers de catégorie A des animaux de l’espèce Sus scrofa scrofa et de race chromosomique pure, avec caryotypage obligatoire pour chaque animal entrant afin de certifier un patrimoine génétique de 36 chromosomes. Ce qui signifie que les animaux à 38 chromosomes ou les hybrides à 37 chromosomes sont interdits et systématiquement abattus en cas de doute ou de fraude. Car libérer dans la nature des cochongliers (hybrides) représente un risque de pollution génétique. Il s’agit donc d’un délit.

Il peut certes y avoir dans le génome de sangliers sauvages les traces d’anciennes hybridations non détectées, puisqu’un caryotypage ne révèlera pas de facteurs d’introgressions par exemple. Sauf que une fois de plus, cette réglementation s’impose avant tout aux animaux séjournant en lieu clos. Car il faut bien comprendre que ces sangliers d’élevage ne sont pas autorisés à relâchés en terrain ouvert. Tout relâcher est soumis à autorisation préfectorale préalable. Cela s’applique même pour des chasses en enclos et des parcs privés. Un lâcher de sangliers dans la nature sans aucune autorisation est donc un délit. A noter que la notion de territoire de chasse en enclos est définie dans l’article L424-3 du Code de l’Environnement.

Lâchers de sangliers et dégâts agricoles, quelques réflexions

Il existe bien des lâchers clandestins de sangliers ou cochongliers (hybrides). Car telle est la nature humaine, certains de nos concitoyens inconscients se croyant autorisés à outrepasser la Loi. Il serait tentant de généraliser ces comportements licites à l’ensemble du monde de la chasse. Prenons le temps cependant de raisonner quelque peu. Si les chasseurs de grand gibier avaient pour habitude de relâcher des Suidés dans la nature, il faudra alors considérer le paradoxe suivant. important à garder à l’esprit. Les dégâts agricoles provoqués par le grand gibier sont indemnisés par les Fédérations Départementales de Chasse (indemnités, voir Art. L426-5 du Code de l’Environnement).

Les FDC, ACCAs et sociétés de chasse n’ont donc aucun intérêt à favoriser les populations de Suidés en milieu ouvert. Sauf si leur objectif est d’augmenter la facture d’indemnisation ! De plus, ces organismes se portent souvent partie civile lors de procès contre des éleveurs contrevenants ou lâchers illégaux. Car dans le contexte actuel, ces organismes cynégétiques paient directement de leur poche les dégâts liés aux Suidés.

Les paysages agricoles actuels favorisent l’explosion démographique du sanglier

Le sanglier a une belle dynamique de croissance pour plusieurs raisons. Le changement climatique donne des hivers plus doux, donc favorables à la survie des marcassins. Les paysages anthropisés permettent des cultures sur de grandes parcelles, des paysages constitués d’agrosystèmes cultivés et d’écosystèmes plus ou moins artificiels, présentent de grandes surfaces propices au sanglier. Les paysages agricoles contemporains offrent de nombreux refuges au sanglier lorsque la quiétude de la forêt est rompue. Les grandes cultures sont également des lieux de transit « à couverts prairiaux » d’une forêt à l’autre sans risquer d’être vu ou chassé par l’homme.

Zones de quiétude, car les usagers des zones boisées (promeneurs, sportifs, chasseurs, etc…) créent un dérangement qui pousse les compagnies à rechercher de nouvelles zones plus calmes. Comme les parcelles agricoles, les réserves, les parcs de loisirs, voire les zones pavillonnaires. En conséquence, le maillage actuel en agroécologie du paysage explique comment de grandes parcelles cultivées entourant des boisements ou forêts peuvent à la fois apporter des refuges de quiétude, mais aussi des zones de nourrissage pour les compagnies.

De même, les zones semi-urbaines voire urbaines profitent de plus en plus au sanglier. Opportuniste dans son alimentation omnivore, il tire parti aussi bien du couvert que du gîte. De plus, ces habitats sont propices à un fort taux de survie des marcassins. Ce qui amène à tenter des solutions non-létales de régulation des populations de sangliers en milieux semi-urbains, avec des résultats encore incertains.

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