En Auvergne, on a des volcans et des hydrocarbures ! Mais par quel miracle me direz-vous ? Grâce au Puy de la Poix, curiosité géologique entre Clermont-Ferrand et Aulnat. La source bitumineuse du Puy de la Poix est un site de seulement 2000 m² dont le CEN d’Auvergne en a la gestion. Autrefois curiosité géologique réputée, le site était depuis lors à l’abandon et enseveli sous les déchets. D’abord en 2009, un chantier nature bénévole rouvre ce site. Enfin en 2012, le CEN l’aménage comme lieu de promenade pour curieux de nature.
Explications géologiques
Ce site géologique est issu de deux événements chronologiques : l’accumulation de sédiments lacustres durant le Cénozoïque en plaine de Limagne, et une activité volcanique ancienne datant de 23 à 34 millions d’années. Après l’effondrement du rift ouest-européen voici 35 millions d’années, l’ancien socle continental est donc fracturé (faille de la Limagne) et le bassin de Limagne se retrouve au niveau de la mer. Il accumule alors des sédiments lacustres. Une première série d’activité volcanique ancienne ponctue la Limagne. Mais du volcan de la Poix, il ne demeure plus qu’un monticule rocheux de quelques mètres d’altitude. Il s’agit en effet des effet les restes très érodés d’une cheminée volcanique pépéritique typique d’un volcanisme à travers des couches sédimentaires gorgées d’eau.
La nappe de bitume est déjà plus remarquable. Elle témoigne de l’enfouissement de biomasse dans des couches sédimentaires privés de dioxygène. Après dégradation biochimique et lente formation de kérogène, la matière carbonée se transforme sous l’effet de la pression et de la chaleur. Il en résulte ainsi des hydrocarbures fossiles. Ce bitume, associé à de l’eau salée, du gaz méthane et des trace d’hydrogène sulfuré, remonte doucement du sous-sol par des fractures de la chappe de pépérite. Bref, ça pue comme une marée basse d’algues vertes bretonnes !
Un riche passé historique
Le mélange d’hydrocarbures s’écoule très lentement, au rythme d’un litre maximum par jour. Ce qui rend alors le gisement commercialement inexploitable. Mais il ne manqua pas d’attirer l’attention de l’homme très tôt dans l’histoire. Un menhir et des objets datant de l’âge du bronze en attestent. A l’époque gallo-romaine, on exploite ce bitume afin d’étanchéifier les embarcations. Le roi Charles IX (1550-1574), passant en Auvergne, demanda à voir le Puy de la Poix, lieu rendu déjà très célèbre parmi les lettrés de l’époque.
Ce site attirait aussi les curieux du XVIIIème au XIXème siècle Certains savants cherchent alors à relier volcanisme et origine du pétrole. D’autres badaux souhaitent éventuellement exploiter le gisement, mais sans succès. Durant la seconde guerre mondiale, le site surplombant légèrement l’aérodrome sert aux Allemands pour y installer une batterie de canon anti-aérien.
On connait même au site des usages plus pragmatiques : le bitume servira à marquer les brebis des troupeaux du secteur ! Dans les années 60, l’agriculteur voisin tente d’utiliser ce bitume pour égaliser le sol de sa porcherie. Une explosion se produit, incendiant la ferme, dont subsistent encore les ruines à quelques mètres du site. Tombé depuis lors dans l’oubli, le site est peu fréquenté des clermontois. Il faut aussi reconnaître que sa localisation entre la RD 772 et l’aéroport ne fait pas rêver ! Le Puy de la Poix est pourtant chargé d’histoire naturelle et locale. Alors, voici un site redécouvrir lors de votre prochaine balade ?
