La Commission Européenne retoque la France sur les chasses traditionnelles

Les chasses traditionnelles bénéficient d’une indulgence bienveillante de la part des autorités françaises. Et ce malgré une opinion publique de plus en plus défavorable à leur maintien. En effet, chaque année, le Ministère de la Transition écologique et solidaire renouvelle les arrêtés permettant la poursuite de ces pratiques de chasse non-sélectives. Pour l’année 2020-2021, la France autorise ainsi la capture de 156030 oiseaux sauvages.

Mais quelles sont ces techniques dites de « chasse traditionnelle » ? Dans les cinq départements de la région PACA, il s’agit du piégeage à la glu. Pour les Landes, la Gironde, le Lot et Garonne et les Pyrénées-Atlantiques, ce sont les chasses à l’aide de pantes (grands filets tendus) ou de matoles (petites cages tombantes). Enfin dans les Ardennes, cela concerne les filets et les tenderies (pièges à collet ou lacets, filets rabattants). Mais toutes ces techniques sont non-sélectives, comme l’a déjà démontré la LPO par le passé. Elles représentent donc d’inutiles menaces pour l’avifaune.

Alouette des champs. Crédits photographiques : Guillaume Calu

Une dérogation à la Directive « Oiseaux »

La Directive européenne « Oiseaux » rend illégale ces pratiques. L’article 8 interdit aux états-membres le recours à des méthodes de capture massive ou non-sélective. Cependant, l’article 9 de la Directive permet de déroger aux mesures de protection. Mais uniquement pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la capture, la détention ou toute autre exploitation judicieuse de certains oiseaux en petites quantités. Néanmoins, le droit français s’appuie sur cet article de la Directive « Oiseaux » pour maintenir encore de nos jours les chasses traditionnelles.

En effet, l’article L. 424-4 du Code de l’Environnement prévoit que, « pour permettre dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective la chasse de certains oiseaux de passage en petites quantités, le Ministre de la Transition écologique et solidaire autorise dans des conditions qu’il détermine l’utilisation des modes et moyens de chasse consacrés par les usages traditionnels, dérogatoires aux moyens généralement autorisés » . Cinq arrêtés ministériels du 17 août 1989 fixent les conditions particulières d’exercice de ces chasses.

Pluvier doré. Crédits photographiques : Guillaume Calu

La bienveillance du Ministère contestée par la LPO

C’est ainsi que la réglementation française assure une disposition légale aux chasses traditionnelles non-sélectives. Le Ministère de la Transition écologique et solidaire publie par conséquent chaque année les quotas d’oiseaux soumis à capture par ces méthodes de chasse. Pour l’année 2020-2021, ces projets d’arrêtés soumis à consultation publique concernent 42.500 Merles noirs et Grives pour la chasse à glu, 106.500 Alouettes des champs pour les pantes et matoles, 5800 Grives et merles noirs, 1200 Vanneaux huppés et 30 Pluviers Dorés pour les chasses aux filets et collets.

En 2019, la LPO a déposé plainte contre la France suite au constat de plusieurs infractions au droit européen. Il s’agit de l’autorisation de chasses traditionnelles en réalité non-sélectives. Mais encore la prolongation de la chasse aux Oies sauvages pendant leur migration prénuptiale. Enfin, le maintien de la chasse d’espèces en mauvais état de conservation. Ces arguments ont fait mouche. Puisque la Commission Européenne vient d’adresser un avis motivé à la France afin qu’elle prenne des mesures contre certaines pratiques de chasse et de capture d’oiseaux.

Vanneau huppé. Crédits photographiques : Guillaume Calu

Vers une sanction contre le gouvernement français ?

Cet avis motivé de la Commission Européenne fait suite à une première lettre de mise en demeure envoyée à la France en juillet 2019. Mais sans qu’aucune mesure ne soit prise pour se mettre en conformité avec le droit européen. Le gouvernement français dispose à présent d’un délai de trois mois pour répondre aux préoccupations de la Commission. À défaut, la France risque une saisine de la Cour de justice de l’Union Européenne.

Si le gouvernement ne réagissait pas à temps, l’Union Européenne pourrait nous imposer des sanctions financières. Une menace qui tombe dans un actualité politique plutôt favorable. En effet, 62 députés réclamaient en juin dernier la fin des chasses traditionnelles. De même, plus de 206.000 citoyens soutiennent l’initiative d’un référendum pour les animaux. Sont-ce pour ces raisons que le nouveau Premier Ministre, Jean Castex, a abordé dès sa nomination la question du « bien-être animal » ? Les prochaines semaines seront déterminantes quant à l’avenir des chasses traditionnelles.

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