De la bonne santé des écosystèmes

La santé des écosystèmes apparaît comme une nécessité afin de répondre aux enjeux de conservation de la biodiversité. Mais aussi limiter le réchauffement climatique et assurer notre bien-être. Mais comment appréhender cette notion ? Un article de Patrick Giraudoux nous éclaire.

Paysage forestier de Murol – Puy de Dôme (crédits photo : Guillaume Calu)

La notion d’écosystème

Qu’est-ce qu’un écosystème ? En écologie, il s’agit d’une unité fonctionnelle comprenant un biotope (le milieu et ses conditions physico-chimiques) et une biocénose (ensemble des communautés d’êtres vivants qui l’habitent) en interaction avec celui-ci. Un écosystème assure diverses fonctions et services écosystémiques, qui nous sont précieuses au regard des retombées économiques et sociologiques générées. Enfin, la notion de « bonne santé » écosystémique est tout autant synonyme de prévention sanitaire des populations humaines !

Un écosystème est semblable à un flux de matière et d’énergie. Parler d’état d’équilibre de la nature est correct à la condition que l’image qui en découle dans l’esprit du lecteur ne soit pas un état figé.
Stationnaire à court terme, un écosystème est appelé à évoluer. Le meilleur exemple de cette dynamique demeure la notion de succession écologique. Ou comment une prairie se ferme alors que l’écosystème évolue inexorablement vers un climax forestier.

Les écosystèmes, à l’image des cellules d’un organisme vivant, ne sont pas des unités isolées. Ils sont interconnectés au sein de paysages complexes. Et la diversité d’unités écosystémiques fonctionnelles contribue à la « bonne santé » du paysage, puis de biomes tout entiers. Mais pour que le paysage soit riche et prospère en terme de diversité et services écosystémiques rendus, encore faut-il que chaque écosystème soit résilient. En d’autres termes, que toute perturbation soit réversible et de préférence au plus court terme.

Résilience des écosystèmes

Pour y parvenir, il faut que l’écosystème ait des atouts dans son jeu afin de se « reconstruire » rapidement en cas de perturbation majeure. L’économiste de l’environnement Robert Costanza propose ainsi deux autres paramètres : la vigueur et l’organisation d’un écosystème. La vigueur d’un écosystème est sa productivité en terme de flux de matière et d’énergie. L’organisation représente la diversité d’interactions et connexions entre ses composantes (communautés d’organismes & biotope). Ces deux paramètres définissent une dynamique fonctionnelle.

La résilience se rajoute à ces deux paramètres comme étant la capacité de l’écosystème à maintenir sa structure fonctionnelle. Son état de santé prend la forme d’un graphique à trois dimensions dans lequel chaque valeur nulle pour un des axes est une situation de « Game over » écosystémique. La « bonne santé » d’un écosystème influence donc la qualité de ses habitats. Et par conséquent influence la santé de sa biocénose. Nous l’avons vu, les écosystèmes ne sont pas figés. Ils sont appelés à continuellement évoluer à long terme, de manière darwinienne.

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La notion de One Health

Mais il ne faut pas confondre évolution et perturbation. En dégradant les écosystèmes, nos activités humaines risquent de provoquer des déséquilibres néfastes. Si la vigueur et l’organisation chutent, la résilience d’un milieu est mauvaise. Les conséquences seront désastreuses. En quelques exemples : perte de services écosystémiques, perturbations des interactions de la biocénose, pullulations, eutrophisations, explosions de réservoirs biogéochimiques ou microbiologiques saturés. Enfin pour notre santé, nous savons que les pandémies sont corrélées à ces perturbations.

D’où la proposition de P. Giraudoux : « Un écosystème est donc en « bonne santé » s’il préserve le maximum de ses fonctions, de ses dynamiques et de ses capacités évolutives potentielles, ainsi que celles des systèmes qu’il inclut et qui l’incluent ». Non seulement cette proposition explore la résilience des écosystèmes, mais elle se connecte parfaitement à nos propres besoins en tant qu’espèce humaine. Et surtout, elle répond à un constat préoccupant : la crise de la biodiversité (écosystémique) est vecteur de maladies.

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La notion écologique de One Health pour laquelle santé des écosystèmes, de la faune et santé humaine sont en définitive interconnectées.

C’est notamment la notion écologique de One Health pour laquelle santé des écosystèmes, de la faune et santé humaine sont en définitive interconnectées. La crise de la biodiversité favorise les pandémies actuelles et à venir. Agir face à la crise de biodiversité ne répond pas à un simple besoin de conservation des espèces. Il s’agit de sauvegarder des écosystèmes précieux pour la bonne santé de nos paysages. Et ainsi prévenir bien en amont un des risques majeurs d’émergence de futures pandémies.

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